Est-ce que cela peut également expliquer votre immense succès à l'étranger, en Corée notamment ?
Je pense effectivement que cette clarté, cette simplicité, touche un public jeune, également des non-lecteurs, qui étaient dégouttés de la lecture. Les gens prennent du plaisir et ne restent pas béats devant une jolie phrase. Je reçois beaucoup de lettres de gens qui me disent qu'ils se sont remis à la lecture grâce à mes livres. Pour la traduction en 35 langues, effectivement, cette écriture simple, accessible, me permet d'être bien traduit. Et puis j'écris aussi pour les générations à venir. J'espère être lu dans cent, deux cents ans. Le temps est la meilleure critique. J'ai d'ailleurs fait une prouesse en tant qu'auteur avec un ouvrage qui me tient particulièrement à cœur « Les Thanatonautes ». Sans la moindre couverture médiatique, ce livre a réussi à faire son chemin. Il était tellement déroutant que personne ne comprenait pourquoi cet objet existait. Et maintenant, il est en train de rattraper « Les Fourmis » en terme de notoriété et devient le livre préféré de beaucoup de mes lecteurs.
C'est dans celui-là que vous vous êtes adonné à l'écriture automatique ? Comment articulez-vous cela avec la précision de votre cathédrale et de vos contraintes de travail, votre discipline d'écriture ?
Pour les scènes d'envol par exemple, je voulais vraiment ressentir quelque chose. Physiquement. Je me suis mis dans le casque audio le « Prélude à l'après-midi d'un faune » de Claude Debussy. J'étais dans un cocon, la musique me saoulant. De cette ivresse est ressortie une écriture. J'étais presque en transe, je suis dans le film, à l'intérieur du film, derrière le miroir, je ne vois pas le temps passer, j'écris. Je regarde ma montre et j'ai écrit pendant 6 heures ! Cela ressemble à un acte physique d'amour, juste de l'émotion, c'est d'ailleurs comme ça que je conçois l'écriture.
Est-ce que vous avez retravaillé ce texte ensuite ?
Oui, mais beaucoup moins que les autres livres, c'était un livre bizarre mais je l'ai assumé. La version définitive est très proche de la première. J'avais comme structure initiale une vision précise du paradis et d'un arbre de vie. J'ai très vite intégré mes scènes à tout cela.
Vous-êtes à la fois très structuré et très ouvert. Chaque livre est-il une aventure ?
C'est une structure chaotique et un chaos structuré. Au moment où j'écris je ne vais pas n'importe où, ni n'importe comment. Il y a ces deux notions indispensables pour moi : musique, géométrie. La musique pour le style, la géométrie pour le plan. Comme quelqu'un qui avancerait dans la forêt, la nuit, avec une lampe torche, mais qui se doute de ce qu'il y a au-delà du faisceau.
- Répondre
Permalien