Deuxième au box-office des no pasaran après les anti-lait, les anti-blé sont légions. Pourtant élevés au Blédina, à la bonne baguette bien de chez nous, aux spaghettis bolognaises et au gâteau de semoule, les no-glutten se découvrent sur le tard une aversion pour tout ce qui touche à cette innocente céréale, base de toute notre alimentation occidentale.
Donc, out le pain tout chaud du boulanger du coin, les bonnes plâtrées de pâtes entre potes et même les germes de blé dans le yaourt (pourtant portés aux nues par d'autres diététiciens). Chez eux, vous aurez le privilège de déguster des penne al dente à l'épeautre, du pain bien dur à base de farine de châtaigne, du taboulé de quinoa, votre progéniture des pizzas tristement bio, du Tonimalt (sorte de breuvage à base d'orge) dilué dans du lait de soja accompagné de crêpes Suzettes grisâtres au sarrasin pour le goûter.... Et de vous manger aussi en pleine figure la sentence tombant comme un couperet si vous avez le malheur, à l'instar des crêpes au sarrasin, de faire grise mine: « Mais si c'est très bon, qu'est-ce que tu racontes !? Bon, d'accord, c'est pas très bon, mais c'est bon pour ce que tu as ». Pan, dans les dents ! Et ne tentez pas de vous inquiéter de ce que vous avez exactement sous peine d'en prendre encore pour votre grade avec une réponse aussi floue que laconique du genre : « Si tu ne le sais pas, ton corps lui le sait ».
Selon les spécialistes psy du comportement alimentaire, cette forme d'auto-contrôle (de soi et d'autrui, ce malheureux qui a eu la mauvaise idée de ne pas décliner diplomatiquement l'invitation à festoyer chez le no-gluten) trahirait une pratique en pleine expansion chez nos contemporains consistant à se créer des interdits et des garde-fous face à une présupposée dégénérescence de la sécurité alimentaire (et générale, aussi, la dégénérescence, ayons le courage de le dire). Notre société part à vau l'eau, mieux vaut se méfier de tout, et surtout de cette mesquine petite céréale jaune prête à nous flanquer des allergies quasi mortelles à la moindre absorption...
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